46,11 milliards de dollars hors du circuit bancaire

Par Abdelkader Mechdal
Les facilitations accordées par la Banque d’Algérie pour le refinancement des banques ont sauvé la position d’un système bancaire qui est arrivé à la fin du troisième trimestre 2020 à une situation critique, puisqu’il a continué à enregistrer une fuite des avoirs pour la 2ème année consécutive, posant ainsi un problème quant aux disponibilités à mettre au profit des agents économiques et la satisfaction de la demande de crédits.
L’année 2020 s’est, donc, achevée par un repositionnement du système bancaire dans une croissance, enfin, positive de ses avoirs financiers, et ce avec l’engagement de la Banque d’Algérie de poursuivre son intervention en matière de refinancement, en recourant une nouvelle fois à la réduction du taux des réserves obligatoires et soutenir la recomposition des disponibilités monétaires. Ces avoirs qui avaient perdu un tiers (1/3) de leur niveau au 4ème trimestre 2019 descendant de quelque 1 600 milliards de dinars au début de la même année pour se situer à 1 100 milliards de dinars, et malgré l’intervention de la Banque d’Algérie au 2ème trimestre 2020 en rabaissant le taux des réserves obligatoires, la liquidité bancaire a continué sa tendance baissière pour perdre quelque 700 milliards de dinars et se situer à 461 milliards de dinars seulement, dans un aboutissement très révélateur quant au manque de performance du système bancaire, devant un état des lieu des plus difficiles engendré par l’arrêt des activités et le recours à la détention des liquidités de la part des individus et des entreprises comme une attitude faisant face à la situation d’incertitude que le pays a connu en marge de la crise économique en relation avec la pandémie et de la crise politique avec la grande mutation que vit le pays depuis déjà 2 ans. Mais qu’est ce qui a fait que la nouvelle intervention de la Banque d’Algérie, en rabaissant encore une fois le taux des réserves obligatoires au dernier trimestre 2020, a pu pousser à la reconstitution des liquidités bancaires ? Pourtant, la même politique opérée auparavant n’a pas pu arrêter l’abaissement des avoirs bancaires. Là, il faut remarquer que la fin de l’année passée a coïncidé avec une reprise relativement importante de l’activité économique, après que les autorités publiques ont recouru à l’assouplissement des mesures de restriction dans le cadre du plan anti-Covid-19. D’une autre part, l’amélioration des conditions du marché pétrolier ont permis au pays de reconstituer une partie de ses réserves de change pour atteindre 42 milliards de dollars en fin d’année écoulée, ce qui fait que leur niveau a baissé de 10 milliards de dollars malgré les importations estimées à 34 milliards de dollars. Voilà une évolution qui donne plus de visibilité et moins de risques pour l’état de l’économie, ce qui met les agents économiques en confiance quant à une meilleure reprise l’année en cours, surtout que les prix du pétrole se stabilisent, enfin, à des niveaux de l’avant la crise due au coronavirus. Il est aussi important de remarquer que les 700 milliards de dinars perdus des avoirs bancaires à la fin du 3ème trimestre 2020 ont trouvé un placement hors le circuit bancaire, alimentant ainsi le marché parallèle et les pratiques de thésaurisation, ce qui a fait augmenter le volume de ces liquidités selon les données de la banque d’Algérie à 6 140.7 milliards de dinars à la fin de l’année passée, c’est-à-dire l’équivalent de 46.11 milliards de dollars en se référant au taux de change officiel du mardi 2 mars 2021. Dans ce sillage, les banques ont pu reconstituer un niveau de leurs avoirs à fin 2020 pour se situer à 632.3 milliards de dinars, mais ce chiffre reste très loin de celui de l’avant crise, ce qui témoigne de l’effort qu’il faut mobiliser dans le cadre des instruments d’intervention de la Banque d’Algérie, mais aussi de la réforme à mettre en œuvre pour la modernisation des banques publiques qui tarde à venir, ce qui met les autorités publiques devant leur responsabilité à trouver une issue au manque d’efficacité du système bancaire en entier.