Analyse de la relation innovation-emploi

Par Younès Ferdj (Craed) et Hocine Bellhimer, ESCF de constantino
D’après les résultats des estimations des trois modèles, on peut constater que, l’effet à court terme de la diffusion des innovations technologiques sur l’emploi est positif et statistiquement significatif (prob < 0,05) dans les deux modèles, ce qui contredit les prédictions théoriques (théorie de compensation). Ceci peut s’expliquer par le fait que l’Algérie et comme la plupart des pays en développement est un pays importateur des biens d’équipements technologiques. Donc la complémentarité entre capital et travail explique l’augmentation de l’emploi suite à l’augmentation des importations de technologies. Le coefficient du nombre de brevets déposé au niveau de l’Inapi est de signe positif et aussi significatif (prob < 0,05) dans les deux modèles.
On peut expliquer par le fait que, en Algérie, les brevets sont très peu déposés et ne sont pas présentés dans tous les secteurs d’activité ainsi la plupart de ces brevets portent sur des améliorations et des adaptations des procédés de fabrication importée. Concernant la relation de la demande sur le marché local approchée par la valeur ajoutée dans chaque secteur d’activité et l’emploi, elle est positive et statistiquement significative (prob < 0,05). En effet, l’augmentation de la demande sur le marché local favorise l’augmentation de l’emploi, donc implique un revenu plus élevé et par conséquent une consommation plus importante.
De même la croissance de la demande externe approchée par les exportations exerce un effet positif sur l’emploi. L’élasticité de l’emploi par rapport au salaire est non significative dans les trois modèles et elle est négative. Les résultats sont semblables à ceux trouvés par Pianta (2001), Antonuci et Pianta (2002) et même pour l’étude de Saafi (2011) dans le cas de la Tunisie.
Le terme d’erreur est composé d’un effet inobservable par secteur qui est constant dans le temps, d’un effet inobservable par période qui est commun à tous les secteurs, et d’un terme qui varie selon les secteurs et les périodes et que l’on suppose non corrélé dans le temps . Des difficultés importantes comportent à l’estimation d’un tel modèle. Cette complication provient de la corrélation entre le retard de la variable dépendante et la perturbation, même si est supposée non corrélée (greene, 2005). L’approche générale, développée à différences époques dans la littérature, repose sur les estimateurs des variables instrumentales et plus récemment sur un estimateur par la méthode de moments généralisés (MMG) développé par Arellano et Bond (1991).
La convergence de l’estimateur de la MMG est conditionnée par la validité des instruments donnés par les valeurs retardées des variables explicatives (Saffi, 2011). Nous allons traiter cette question en appliquant deux tests de spécification définis par Arellano et Bond (1991). En effet, la validité d’ensemble des instruments peut être vérifiée à l’aide du test de sur-identification standard de Sargan qui s’appuie sur l’estimateur de la MMG en deux étapes et est corrigé pour l’hétéroscédasticité. Nous testons également l’absence d’auto-corrélation du premier et du second ordre des résidus en différences premières. Dès lors, si le test ne peut rejeter l’hypothèse nulle d’absence d’auto-corrélation du second ordre, nous concluons qu’ils sont non corrélés et que la condition sur les moments est correctement spécifiée. Les résultats des trois modèles sont présentés.
Les résultats mentionnés représentent : dans la première colonne les dépenses de technologie comme indicateur de l’innovation, dans la deuxième colonne les brevets comme indicateur de l’innovation technologique et dans la troisième colonne les deux indicateurs sont pris dans la même spécification. D’après les résultats présentés dans les modèles précédents, quelle que soit la spécification retenue, le test de sur-identification de Sargan n’indique aucun problème en ce qui concerne la validité des variables instrumentales.
De plus, le non- rejet de l’hypothèse nulle d’absence d’auto-corrélation de second ordre confirmé par une statistique non significative dans les trois modèles. Cependant si les résultats d’estimation indiquent que l’effet de la diffusion des technologies importées est positif à court terme, les résultats montrent que cet effet est négatif à moyen et long terme. Pour cela, on peut dire que ce résultat contredit la théorie de compensation appliquée au niveau des pays développés. Pour la période 2000-2011, les principaux résultats d’estimation montrent que l’effet, de moyen et long terme des innovations technologiques importées sont non significatifs avec un effet négatif dans les deux modèles. Ainsi que la variable de la brevetabilité qu’elle est statistiquement non significative et a un effet positif sur l’emploi.
En conclusion, notre article porte principalement sur l’étude de la relation entre l’innovation technologique et l’emploi industriel en Algérie. Donc l’objectif principal est d’examiner à partir d’un modèle économétrique par les données de panel les effets de court et de long terme des innovations technologiques sur l’emploi industriel en Algérie sur la période (2000-2011). Les résultats économétriques que nous obtenons à partir des données sur les industries algériennes s’opposent aux conclusions théoriques de la littérature qui stipule que, l’innovation technologique détruit des emplois à court terme c’est l’effet de remplacement, (remplacer l’homme par la machine) mais à moyen et à long terme en crée des emplois c’est l’effet de compensation.
En effet, nous trouvons que l’effet de la diffusion des innovations technologique importées ainsi que de la brevetabilité déposée sur l’emploi est positif à court terme. Une relation positive significative entre la demande sur le marché des produits (approchée par la valeur ajoutée dans chaque secteur d’activité) et l’emploi, et entre la demande extérieure (approchée par les exportations dans chaque secteur d’activité) et l’emploi. Ainsi que, l’interaction entre l’emploi et les salaires est positif à court terme. Mais, nous trouvons, en utilisant les modèles de panel dynamiques avec une estimation par la méthode des GMM, que l’effet de moyen et long terme des innovations importées sur l’emploi est négatif.
Cet effet négatif a été vérifié dans la plupart des travaux empiriques dans les pays du Maghreb et celle de l’étude de Saafi (2011) dans le cas de la Tunisie. En effet, l’expérience internationale montre que la diffusion des innovations technologiques et donc une croissance rapide de la productivité du travail, peut stimuler la rentabilité des entreprises et favoriser les investissements qui va se traduire par une plus forte croissance de l’emploi (Saafi, 2011). Cependant, on peut dire que l’Algérie ne semble pas profiter pleinement en termes des technologies importées et de croissance d’emplois. Cela implique que le problème tient souvent, non pas aux technologies importées elles mêmes, mais plutôt à l’adaptation et l’appropriation de ces technologies.