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L’efficacité des politiques sociales se mesure aux finalités de la Société

Or, l’application du programme de stabilisation et d’ajustement s’est traduite par un double phénomène : d’une part, une forte hausse des prix et d’autre part, une augmentation moins rapide des revenus salariaux. La conjugaison de ces deux phénomènes nourrit une tendance à la détérioration croissante des pouvoirs d’achat et donc des niveaux de vie de larges couches de la population, accentuant par-là même la paupérisation des plus démunis et entretenant des processus renouvelés d’exclusion sociale. La libération des prix a eu, dans un premier temps pour effet d’accélérer l’inflation, singulièrement depuis les mesures de suppression des subventions de la plupart des produits de première nécessité qui bénéficiaient d’un soutien budgétaire jusqu’en Juin 1992. Comme conséquence de la contraction de la demande induite par la politique de stabilisation, l’inflation s’est ensuite ralentie et a alors accusé un trend baissier à partir de 1996, pour atteindre 2,6% en 1999. Néanmoins et dans le même temps, les revenus des ménages et notamment les salaires, ont cru à un rythme moins rapide que le niveau général des prix, en particulier des prix à la consommation, engendrant des déficits difficiles à rattraper, en l’absence d’une véritable relance de la croissance et de l’emploi. 

Les dispositifs d’emplois et de filets sociaux conçus principalement comme mécanismes d’attente de reprise de la croissance ont occulté le débat sur la protection sociale en économie de marché ; en outre, leur efficacité toute relative n’a pu endiguer la montée de la pauvreté et l’élargissement de l’appauvrissement, notamment des classes moyennes. L’approfondissement de la fracture sociale est par ailleurs amplifié par le maintien à un niveau élevé du taux de chômage, en particulier des jeunes, résultat des licenciements induits par la restructuration des entreprises et de l’atonie persistante de l’investissement.

Dans ce contexte, la réduction des dépenses budgétaires, en termes réels, et singulièrement des dépenses sociales, contribue à détériorer davantage le taux de couverture et la qualité des services collectifs. Les problèmes posés par la transition vers l’économie de marché ne sont pas spécifiques à l’Algérie et présentent des caractéristiques communes dont la principale est la restructuration des politiques sociales. C’est ainsi que l’on peut dire que les politiques sociales sont l’objet d’un débat dont l’argument central est l’opposition apparente entre l’efficacité sociale et la rentabilité économique. Or, une politique sociale est le reflet d’un système de hiérarchisation des objectifs que se fixe une Société et de l’arbitrage qu’elle apporte entre intérêts individuels et collectifs de ses membres et des classes qui la compose. 

Pour pouvoir hiérarchiser les objectifs il est nécessaire d’adopter un système de référence qui permette d’apprécier les évolutions et changements constatés dans la société afin que l’Etat puisse continuer à assurer la cohésion sociale, et que chaque individu puisse exercer ses droits sans qu’il soit isolé du devenir de sa Société. 

Ce système de référence conduit aussi, de façon pratique, à déterminer les variables stratégiques tant du dialogue social que de la politique sociale. Les deux indicateurs qui fondent généralement les systèmes de référence de l’évolution économique et sociale sont la croissance et le développement. 

Toutefois ces deux indicateurs s’avèrent insuffisants à la compréhension des systèmes de référence des politiques sociales. En effet, la croissance, somme des valeurs ajoutées, est un indicateur purement économique et financier partiel et équivoque. Ce qu’il est important de savoir, c’est non seulement combien produit une économie, mais également ce qu’elle produit, comment elle produit et comment se fait la répartition.

Le modèle de croissance est donc tout aussi important que le taux de croissance, surtout en économie de marché qui subordonne le social à l’économique. C’est donc non pas la remise en cause de cet indicateur qu’il faut viser mais son utilisation comme condition nécessaire et suffisante au progrès social. La croissance est nécessaire à l’économie mais elle n’est pas nécessairement synonyme de progrès social et de développement. 

Quant à l’indicateur de développement, tout en étant plus complet que celui de croissance, il est néanmoins plus difficile à mettre en œuvre. La mesure du développement social ne peut être réduite à une unité de valeur monétaire, de même que les différents indicateurs complémentaires ne rendent compte que de manière partielle des transformations qualitatives de la Société. 

Aussi, ce rapport, dont l’objectif est la mesure des impacts du programme d’ajustement structurel et de la transition vers l’économie de marché sur la sphère sociale, s’efforcera d’en saisir les caractéristiques en combinant deux approches : 1- la première consiste à relever les évolutions significatives dans trois domaines, l’emploi, la protection sociale et le mode de vie. 2- La seconde repose sur une vision politique et renvoie aux systèmes de référence qui fondent la cohésion sociale et son devenir. La première approche est statique et n’éclaire que partiellement sur les choix sociaux et les rapports entre les forces sociales. Elle privilégie les objectifs sans expliciter les finalités des politiques sociales.

La seconde permet de mieux comprendre les systèmes de référence et d’apprécier les politiques suivies dans leur cohérence avec ces systèmes. L’efficacité des politiques sociales ne se mesure pas en termes de coûts économiques et financiers mais en termes de coûts/avantages, par rapport non seulement à leurs objectifs propres mais aux finalités de la Société. L’exercice consiste alors à évaluer l’efficacité des réformes et de l’économie de marché sur le développement social ainsi conçu. C’est à dire comment les hommes se nourrissent se soignent, se logent, s’instruisent et travaillent ; comment ils se protègent contre les risques ; comment s’opère l’égalisation des chances entre eux . En définitive ce que chaque augmentation ou réduction du taux de croissance leur apporte ou leur retranche au cours d’une période donnée. 

Chaque Société, selon son génie propre, opère une pondération sur chacune des questions suivantes : – Les conditions matérielles d’existence, – La sécurité du revenu, de l’emploi et la protection sociale, – Le mode de vie et sa qualité, – L’égalité des chances en matière de revenu, d’éducation et de statut social, – La participation à la décision. Ce sont ces principales questions qui « font » les politiques sociales. Le Rapport National sur le développement humain élaboré en 1999 a présenté le système de référence qui a constitué la base des politiques sociales en Algérie depuis l’Indépendance jusqu’aux années 90. Le présent rapport s’intéresse plus particulièrement aux conséquences des réformes structurelles engagées depuis dix (10) ans et aux transformations que l’économie de marché apportera aux fondements mêmes de ces politiques, qui s’inscrivent dans le cadre du développement humain. Il comporte quatre parties : ♣ La première est consacrée à l’organisation de l’économie et au cadre institutionnel. ♣ La seconde traite des politiques sociales dans leurs rapports avec l’évolution des composantes de l’IDH. ♣ La troisième évalue les évolutions des indicateurs complémentaires du développement humain.

Par CNESE

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