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Les définitions de la pauvreté en Algérie

Les programmes mis en œuvre, malgré les efforts entrepris pour leur diversification, revêtent une dimension marginale, en considération du volume et de la nature des besoins. Ainsi, les dispositifs destinés à l’insertion professionnelle des catégories juvéniles, qui sont les plus massivement et les plus durement touchées par le chômage, ne bénéficient pas des moyens à la mesure des attentes et des enjeux, puisqu’ils ne mobilisent que 0,3% du PIB. 

Le poids du salariat, qui constitue la base principale de production de richesses, est en forte et constante régression, alors que dans le même temps, aussi bien les mesures prises que le discours qui les accompagne, semblent privilégier le développement de l’auto emploi et d’activités en marge du salariat. Les mesures alternatives au licenciement, préconisées par le droit du travail, ont été globalement ignorées par les entreprises où la recherche de la flexibilité a été réduite le plus souvent à la compression des effectifs, dans un contexte marqué par de lourdes incertitudes sur leur propre devenir. Le faible niveau de la structure des emplois existants rend en outre aléatoire toute anticipation sérieuse sur la mobilité des qualifications entre entreprises et entre secteurs. 

A ces difficultés, il faut ajouter les autres rigidités du système de l’emploi, où prédominent les multiples contraintes à la mobilité liées au logement, au transport, ou encore les retards que comptabilise la mise sur pied d’une administration de l’emploi moderne et performante, lorsque l’on sait l’état végétatif dans lequel est maintenu le service public de l’emploi. 

Face à une telle situation, l’interrogation est grande quant à l’efficacité des moyens destinés à promouvoir des emplois de proximité, quand les prestations et services de masse attendent des programmes autrement plus ambitieux, et quant à la pertinence du discours tourné quasi exclusivement vers l’encouragement de la micro entreprise, quand les entreprises de moins de dix (10) salariés constituent la majorité des entreprises privées existantes.

Une réflexion davantage orientée sur les possibilités de restaurer l’offre d’emploi, que seul un réengagement des pouvoirs publics semble pouvoir impulser aujourd’hui est nécessaire, en l’absence d’autre alternative sur le court terme (IDE et investissements privés significatifs). 

C’est aussi aux pouvoirs publics qu’il revient d’agir de manière plus conséquente pour favoriser l’émergence d’un véritable marché du travail et de tous les instruments qui permettent sa régulation.

Le thème de la pauvreté a déjà été abordé dans le Rapport National de Développement Humain élaboré pour la première fois par l’Algérie en 1999. 

La complexité intrinsèque du phénomène de pauvreté, mais également la diversité de ses déterminants et leur particularité, ont rendu difficile l’identification d’un profil de pauvreté unique et /ou dominant en Algérie. 

En effet, les résultats de l’enquête consommation de 1995 sur lesquels était basée principalement l’analyse avaient soulevé plusieurs paradoxes. 

Pauvres et non pauvres occupaient des espaces communs en matière de santé, d’éducation, de logement, de telle manière que l’approche classique des critères distinctifs entre pauvres et non pauvres, et des comportements logiques devant découler d’une situation de pauvreté était remise en question. 

L’on rappellera, parmi les paradoxes relevés, ceux qui paraissent les plus significatifs : – en matière de santé, près de la moitié des plus pauvres (45,6% du premier décile) avaient recours à la médecine privée, – le type de logement n’est pas toujours un indicateur de la hiérarchie des revenus : 9,4% des pauvres occupaient « des villas » contre 12% pour les non pauvres.

Le statut du logement confirme ce paradoxe, 69,5% des pauvres étaient propriétaires de leur logement contre 62,7% pour les non pauvres, En 2000, les résultats préliminaires partiels de l’enquête consommation confirment ces paradoxes puisque la période de transition vers l’économie de marché aurait permis de réduire les inégalités. 

Ces dernières passeraient d’un rapport de 1 à 12 en 1988 à 1 à 10 en 2000 et ce, au moment où le phénomène de paupérisation est patent et où la définition d’une stratégie de lutte contre la pauvreté figure dans les préoccupations prioritaires des pouvoirs publics. 

Néanmoins, si les caractéristiques de la pauvreté en Algérie ne répondent pas toujours aux critères qui définissent généralement cette dernière, la dégradation de certains indicateurs attestent d’un processus d’appauvrissement des ménages ayant des revenus salariaux depuis 1988. 

Quelques indications sur la dépréciation des revenus salariaux sont fournies par le document de synthèse de la Conférence Nationale de Lutte contre la Pauvreté et l’Exclusion, ces évaluations sont basées sur les données de l’ONS et sur des estimations du niveau de pauvreté en trois seuils, selon la méthode de la Banque Mondiale. 

Selon ces estimations, il apparaît une nette tendance à la paupérisation des salariés et des retraités, dont les salaires réels se seraient dépréciés de 35% entre 1991 et 1998. 

L’hypothèse retenue considère un ménage algérien de taille moyenne (environ 6 personnes par ménage) et dont le seul revenu proviendrait de la rémunération du chef de ménage. En prenant comme base le SNMG (soit 6000 DA par mois jusqu’en 2000) ou les différents niveaux de salaires de la fonction publique, le document présente le tableau suivant : – Le SNMG placerait le ménage en situation d’extrême pauvreté, puisque ce revenu, ramené à la quote part par personne et par an, se situerait à un niveau plus bas que le seuil de pauvreté alimentaire (inférieur de 22% à ce seuil) ; – Il en est de même pour le salaire de la catégorie 10 de la fonction publique, qui procure un revenu moyen de 87 880DA/an, et se situe en deçà du minimum vital (estimé à 15 413 DA/ personne/ an) ; – Le niveau salarial de la catégorie 14 (117 400 DA) serait à peine supérieur au seuil inférieur de pauvreté évalué à 20 884 DA : personne/ an) ; – Le salaire annuel de la catégorie 17 (151 640 DA) situerait ses bénéficiaires en dessous du seuil supérieur de pauvreté (25 622 DA/ personne/ an).

Selon cette hypothèse, qui mériterait d’être étayée par des investigations complémentaires, de nombreux fonctionnaires, c’est à dire des agents de l’administration publique et des institutions et organismes régis par le statut général de la fonction publique émargeraient à la catégorie des pauvres.

Les effectifs de la fonction publique sont évalués en 1999, à environ 1,4 millions de personnes, dont 18,1% de cadres, 34,9% d’agents de maîtrise et 47% d’agents d’exécution, catégories auxquelles il faut ajouter les retraités, dont le montant de la retraite représente, dans le meilleur des cas, 80% du salaire. Il demeure néanmoins relativement malaisé d’établir sur ces seules indications partielles et imprécises et sur la base du seul critère monétaire une typologie de la pauvreté en Algérie et ce, pour différentes raisons : – le seul revenu relativement cerné sur le plan statistique est celui des salaires déclarés. 

A ce sujet on rappellera quelques données significatives : ∙ selon une enquête réalisée par les services du Ministère du Travail et de la Protection Sociale auprès d’un échantillon de 8 000 entreprises privées, 55% des travailleurs n’étaient pas déclarés, ∙ le taux « d’évasion sociale » est évalué à 40%, ∙ selon l’enquête ONS auprès des ménages de 1996, 30% des occupés ne cotisaient pas à la sécurité sociale. – Le poids de l’emploi informel est tel qu’il altère toute analyse basée uniquement sur l’emploi structuré. Selon des données communiquées dans le cadre du séminaire sur le genre (organisé en Mars 2000), dans le secteur non agricole, supposé être le mieux structuré, le poids de l’emploi informel était déjà en 1987 de 32%.

Par le CNESE

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