L’Etat face au casse-tête des entreprises publiques

Par Essaïd Wakli
Depuis quelques années, le secteur économique public pose de réels problèmes aux autorités. Des sommes faramineuses sont injectées sans que cela ne donne des résultats probants.
L’actuel ministre de l’Industrie tente d’apporter des réponses. Et toutes les options sont sur la table.
Les récents mouvements de protestation, signalés notamment au sein de l’Enterprise des industries de l’électroménager (Eniem) de Tizi Ouzou sont symptomatiques du malaise de ce secteur public qui n’arrive visiblement pas à vivre avec les nouvelles mutations que connaît le pays. Parmi les «tares» relevées dans la gestion de ces sociétés, figure notamment l’interférence politique dans leur management. Une situation que certains ministres veulent éviter. C’est le cas de Brahim Boumzar, le ministre de la Poste et des Télécommunications. «Le gouvernement œuvre à la création d’un écosystème favorable et facilitateur pour l’émergence de ces entreprises publiques sans s’ingérer dans leur gestion quotidienne et d’éviter d’être une partie prenante», a-t-il souligné lors d’une rencontre organisée mardi à Alger. Il a relevé au passage «les difficultés que rencontrent certains managers des sociétés étatiques à trouver des solutions aux problèmes auxquels elles sont confrontées ces entreprises».
Un avis que partagent certains experts. «Il faudra, notamment, replacer les entreprises sous l’autorité des conseils d’administration et relâcher l’emprise autoritaire des ministères. Ces conseils d’administration devront, pour l’essentiel, être constitués d’administrateurs indépendants de profil experts, à côté des administrateurs représentant les propriétaires. Une fois ce préalable levé, de nouvelles règles de gouvernance devront être apportées sur les modalités de sélection des managers, de responsabilisation, de transparence et de redevabilité sur les actes et les performances», indique par exemple Ali Harbi, expert en développement. Un avis partagé par le ministre de l’Industrie, Ferhat Aït-Ali qui a indiqué récemment que les aides de l’Etat seront désormais conditionnées par des contrats de performance.
En plus de cette gestion «politique», les entreprises du secteur public souffrent de problèmes d’adaptation aux nouvelles technologies. «Malheureusement, nos entreprises n’ont pas anticipé suffisamment sur le développement. Aujourd’hui, si nous restons sur des modèles classiques de gestion et nous attendons toujours les instructions du ministère, ceci ne va pas marcher. Et si on décide de s’ouvrir à la concurrence, beaucoup de nos entreprises vont couler. Nous avons encore des sociétés pléthoriques avec des sureffectifs par rapport aux normes économiques», note Brahim Boumzar, dans une déclaration citée par l’APS.
Face à cette situation, certains n’hésitent pas à proposer des solutions radicales. A commencer par des privatisations. Une option que l’Etat a déjà proposée mais souvent abandonnée pour des considérations politiques. «Nous pensons que la solution idoine est que l’État assainisse une «dernière fois» ces entreprises avant de les privatiser pour augmenter son pouvoir de négociation lors de la cession. Ensuite, réaliser des privatisations «majoritaires», car l’acheteur aura besoin du contrôle pour appliquer sa stratégie», suggère Chabane Assad, analyste financier dans une interview. En plus de cela, les autorités pensent à ouvrir partiellement le capital de certaines sociétés. Mais cela est pour l’instant au stade des idées.