Quelles sont les mesures à prendre ?

Balance des paiements et équilibre budgétaire
La situation économico-financière de l’Algérie est calamiteuse. Tous les voyants sont, en effet, au rouge, d’où la nécessité de prendre des mesures urgentes afin de faire baisser le train de vie de l’Etat, dont le déficit budgétaire ne cesse d’augmenter. Des experts du Cercle d’action et de réflexion autour de l’entreprise (Care) l’ont estimé entre 2 500 à 3 000 milliards de DA annuellement.
Par Zahir R.
Dans ce cadre, Mouloud Hedir, économiste et membre du Care, a insisté d’abord sur la transparence dans la communication de l’information économique et budgétaire, qui est un droit pour tous les citoyens, la restauration d’un climat de confiance entre les différents acteurs, et la reforme de notre système de gouvernance. Pour lui, il est primordial de faire un état des lieux afin de connaître le taux exact du déficit budgétaire et ensuite permettre aux économistes de trouver les solutions appropriées. «Malheureusement, ce n’est pas le cas chez nous. D’ailleurs, je défie quiconque de donner le taux réel du déficit budgétaire. La gestion financière de notre pays est politisée et plusieurs décisions n’ont rien de convenance avec les règles économique», a-t-il dit lors d’une table ronde organisée hier à Alger par le Care, sur la thématique : «Quelles priorités pour une feuille de route économique pour l’Algérie à l’horizon 2022 ?». M. Hedir s’est, en outre, montré inquiet pour l’avenir du pays, notamment durant cette période de crise politique qui perdure encore. Il a déploré le fait qu’aucune institution «ne s’occupe de la situation actuelle. Nous sommes dans l’obscurité totale». Concernant le déficit de la balance des paiements, le même interlocuteur a rappelé qu’à travers le monde, «tous les pays font des ajustements dans le commerce extérieur, mais ici en Algérie, rien n’a été fait jusqu’à présent. La preuve, nous continuons de subir un déficit de plus de 20 milliards de dollars annuellement». Selon lui, les mesures prises par le ministère du Commerce ne s’accommodent pas à la réalité du terrain. Mouloud Hedir a préconisé de rétablir la confiance entre les différents acteurs, puisque la solution devrait être trouvée par nous, les Algériens, tout en minimisant le danger de recourir à l’endettement extérieur. Pour sa part, Rachid Sekak, consultant international en finances, a fait savoir que notre pays vit au- dessus de ses moyens, et sans aucune vision. «Aujourd’hui, la situation nous oblige de changer nos pratiques et de faire appel aux compétences crédibles afin de remettre le train de l’Etat sur les rails», a-t-il souligné. Parmi les mesures à entreprendre, l’économiste a plaidé par la réduction des dépenses publiques, chercher de nouvelles ressources, notamment dans le circuit informel qui détient près de 60% de l’économie algérienne, encourager les exportations hors hydrocarbures, tout en supprimant les obstacles bureaucratiques, le recours à l’endettement extérieur pour le financement des projets économique, l’ajustement du taux de change, faciliter l’investissement aux étrangers afin de capter plus d’IDE et l’abolition de la règle 51/49, qui n’a rien apporté de plus pour notre économie. «Des solutions purement économique doivent être prises en urgence. La solution à moyen terme sera difficile», a-t-il prédit.
Aller vers la privatisation de l’éducation et la santé
Par ailleurs, Mourad Goumiri, docteur d’état en sciences économiques, a estimé que la solution vient de la privatisation, en particulier l’éducation et la santé. Deux secteurs qui pèsent lourd sur le Trésor public, sans toutefois assurer la qualité de services, dira-t-il. Pour lui, l’octroi d’agréments officiels aux universités privées et écoles permettrait d’alléger les dépenses de l’Etat et de contribuer même à l’amélioration de la fiscalité.
À cela s’ajoutent la nécessité de la privatisation des entités publiques déficitaires, le ciblage des subventions et l’élargissement de l’assiette fiscale. Souhil Meddah, analyste financier, a affirmé dans son intervention qu’il est indispensable d’opter pour une reconfiguration totale ou partielle des facteurs déclencheurs pour préparer une nouvelle orientation des priorités économiques. Pour la maîtrise de nos dépenses, «nous devons nous doter d’une prospective pour définir le futur projet de société, en identifiant les potentialités actuelles ou futures tenant compte des orientations géostratégiques, économiques, monétaires et en traçant sur cette base des objectifs précis sur le très court et le court termes, le moyen et le long termes, recadrer les relations bilatérales dans les relations avec les pays ayant un déficit bilatéral important dans un aspect qui passe par les groupes d’importations, remettre à niveau le cadre général et les règles des IDE afin de soutenir les ressources de la balance des paiements et la nécessité de dévaluer le dinar pour contribuer à la règle des débouchés». Concernant les mesures microéconomiques, M. Meddah a plaidé pour mettre un terme aux bonifications des taux d’intérêt et passer vers une réduction du taux directeur de rémunération, d’intérêt ou d’escompte, pour soutenir la politique d’industrialisation dans un cercle consolidé, limiter les dotations accordées aux entités publiques et les remplacer par les instruments du marché, faire des appels publics, réguliers et périodiques, à l’épargne pour des financements obligataires ciblés et la monétisation de la contrepartie des services offerts par les infrastructures réalisées ou en cours de réalisation.