Réforme et modernisation du système bancaire algérien

Par Halim Arroudj, enseignant universitaire
La pensée dominante dans les années 80 et 90 en économie a considéré que la politique de la libéralisation financière était clairement favorable au développement financier qui conduisait à la croissance et au développement économique.
Cette vision ou conception néolibérale était fondée sur des approches théoriques et empiriques que l’on a présentées au premier chapitre. Mais en réalité, l’examen de la politique de la libéralisation financière à donnée naissance à une littérature (littérature des crises bancaires) qui soutient une thèse parfaitement opposante à ceux qui défendent le bien-fondé du principe de la libéralisation totale des systèmes financiers. En effet, les opposants de la libéralisation financière affirment que les politiques de libéralisation financières ont accentué la fragilité des systèmes financiers, ce qui a conduit à la multiplication des crises bancaires systémiques (objet de notre première section). Ces opposants se sont développés au cours de la seconde moitié des années 90 suite à la succession des faillites et des déséquilibres bancaires et financiers dans le monde et dont la gravité apparaît sans précédent, touchant la majorité des pays. Suivant cette littérature (littérature des crises bancaires), les expériences réussies de la libéralisation financière sont très rares et dans le cas général, la libéralisation financière provoque une crise dans le système bancaire et financier accompagnée par une chute brutale de la croissance et une contraction du PIB.
Les incertitudes des bénéfices de la libéralisation en rapport avec l’importance de ses coûts ont remis en cause le bien-fondé du principe de la libéralisation financière. Les conséquences désastreuses liées à l’instabilité financière internationale ont suscité l’émergence de l’intérêt apporté à la gouvernance bancaire (objet de notre seconde section). L’exercice de la bonne gouvernance au sein du milieu bancaire et financier est une condition nécessaire à la stabilité financière. En effet, le secteur bancaire se caractérise par rapport aux autres secteurs par le poids et l’importance de la réglementation bancaire qui encadre et régit l’activité bancaire.
La réforme des instruments ou des mécanismes influençant l’activité bancaire par le CB dans le cadre de la mise en œuvre des accords de Bâle illustre bien à la fois les dangers qui peuvent surgir d’une réforme financière trop libérale ou mal maîtrisée et l’importance de la régulation bancaire, notamment la supervision bancaire en tant que filet de sécurité pouvant affaiblir la fragilité des systèmes financiers contre d’éventuels chocs ou d’effets de contagions externes (objet de notre troisième section).
L’instabilité financière et dynamique des crises bancaires
Les politiques de libéralisation financière engagées depuis les années 80 offrent un bilan contrasté : d’un côté, le développement marquant de l’industrie financière (développement des acteurs financiers, développement des marchés de capitaux, développements des instruments financiers….) semble bien avoir accru au niveau mondial l’efficacité du financement des économies, d’un autre côté, la multiplication des crises bancaires dans toutes économies quel que soit leur degré de développements, témoignant ainsi d’une forte augmentation de l’instabilité des systèmes bancaires et financiers.
Au cours de cette section, notre objectif consiste en premier lieu, à expliquer le phénomène de l’’instabilité financière et du risque systémique qui menacent le bon fonctionnement des systèmes financiers. En deuxième lieu, on se consacre à identifier la nature et les facteurs à l’origine des crises bancaires dans un contexte de libéralisation financière. Et en fin de compte, vu le nombre des crises bancaires manifestées depuis l’effondrement de la conférence de Bretton-Woods, nous nous proposons d’apporter des explications théoriques et empiriques des différents déterminants économiques des crises bancaires.
Il n’existe pas une définition claire et précise de l’instabilité financière. Dans la littérature économique, les auteurs se sont plus fixés à définir le concept positif de la stabilité financière, qui commence à prendre une part importante dans l’agenda des institutions financières internationales (FMI, BM..) à partir de la seconde moitié des années 90.
La forte concurrence constatée entre les banques elles-mêmes et entre les banques et les marchés financiers, a poussé les banques à rendre négociables leurs créances et dettes vis-à-vis des agents non financiers. Le développement du marché interbancaire, du marché hypothécaire et du marché des titres de créances négociables à court et moyen termes constituant le marché monétaire est la conséquence de cette concurrence.
1.2)- Les éléments ayant contribué à la mutation des métiers bancaires
Les événements ayant contribué aux ouvertures économiques (suppression des droits de douanes, paradis fiscaux, politique monétaire expansive etc…) ont permis aux entreprises de différentes tailles de conquérir de nouveaux marchés ou segments que ce soit au niveau domestique ou international. Pour accompagner le développement des entreprises industrielles et commerciales, les gouvernements, il est à noter que l’activité de «bancassurance» ne figure à aucun niveau de la ventilation des métiers bancaires proposée par Bâle II. Ils ont libéralisé également leurs secteurs bancaires et financiers. Ce changement au niveau des systèmes bancaires s’explique par l’abolition de plusieurs régimes qui ont caractérisé la période de l’après-guerre jusqu’au début des années 80 à savoir :
- Le passage à un système de change flottant : En 1976, les accords de la Jamaïque ont donné la reconnaissance formelle de la flottabilité des monnaies et démonétisation de l’or.
- La suppression de l’encadrement de crédit : L’encadrement du crédit est une technique permettant à une Banque centrale d’atteindre les objectifs qui lui sont assignés dans le cadre de la politique monétaire. Les autorités monétaires fixent le volume global des crédits que chaque banque est autorisée à consentir compte tenu de la progression de la masse de monnaie voulue et de croissance économique anticipée. Cette technique a été depuis les années 70, l’instrument central de la politique monétaire de plusieurs pays de l’OCDE (la France, l’Italie, les Pays – Bas et le Japon). La France a été le seul pays à utiliser cet instrument (de 1973 à 1985) de façon permanente. A la fin des années 90, le mouvement général des réformes économique et financière at fini par convaincre un ensemble de pays d’abandonner les anciennes pratiques (notamment le système de contrôle des changes).
- La libéralisation des taux d’intérêt : son rôle, c’est accompagner par l’ouverture des systèmes financiers des pays développes et des pays émergents à la concurrence internationale.
- Le développement des technologies : Les avancées constatées en matière de NTIC matérialisées par des outils, logiciels, et procédures informatisées ont largement contribué au développement de la sphère financière que ce soit au niveau domestique ou international.
Les conséquences multiples de ces différentes mesures dé-régulatrices ont affectés la quasi-totalité du monde de la banque et de la finance.
Schématiquement, au niveau des pratiques bancaires, on peut noter les changements suivants :
- Le passage de la banque traditionnelle au rapprochement du marché (banque de marché) : A la fin des années 70, s’est développé un processus d’homogénéisation et d’allégement de la réglementation bancaire et financière dont l’achèvement est relativement récent. Dans ce cadre, les banques se sont rapprochées des marchés financiers en complément de leurs opérations traditionnelles.
- Le passage de la banque domestique à la banque internationale : Le passage d’une économie fermée à une économie ouverte conduit à un système bancaire et plus généralement financier beaucoup plus complexe et à une multiplication des instruments financiers. Dans ce cadre, un système bancaire et financier ouvert à l’international offre toute la gamme des services bancaires avec des services financiers non bancaires. En plus des activités bancaires traditionnelles internationales, les activités financières que propose un système bancaire et financier international.
A suivre