Zemali divise les syndicats

Soumis à l’exigence de 20% de représentativité
Le ministère du Travail est déterminé à assainir la situation des Organisations. Il ne restera sur la scène syndicale que celles ayant une représentativité réelle, soit une représentation dans 20 wilayas au minimum.
A travers cette mesure légale du point de vue juridique, le gouvernement semble avoir tiré les leçons des mouvements de grève qui ont fortement secoué le pays dernièrement, en particulier dans le secteur de l’éducation et de la santé. Reconnaissant, toutefois, le droit à la grève aux Organisations syndicales, qui est constitutionnel, la tutelle tient cependant à faire respecter les fondamentaux du syndicalisme, où la grève ne doit en aucun cas être utilisée comme moyen de chantage et de surenchère durant la négociation.
Cette décision ,a, pour autant, partagé les syndicats autonomes. Certains d’entre eux estiment que cette mesure est «restrictive» à la liberté syndicale qui est garantie par la Constitution, alors que d’autres pensent le contraire en affirmant que cette dernière est purement administrative et légale.
Dans ce cadre, le président du syndicat des paramédicaux (SAP), Lounès Cachi, a relevé, hier dans une interview téléphonique qu’il nous accordée, que son syndicat procède annuellement à l’envoi de la liste des adhérents au ministère, et que cette mesure ne représente aucune entrave à leur activité syndicale. «Nous n’avons aucun problème dans ce sens. Au contraire, cette mesure va nous permettre d’évaluer nos différentes sections syndicales et de changer celles qui n’activent pas», a-t-il souligné.
Il a, en outre, affirmé que certains syndicats parlent «de 100 000 adhérents alors que sur le terrain, c’est une autre réalité. Ils donnent des chiffres incorrects ! Avec cette mesure, seuls les syndicats ayant une représentativité vont rester en activité».
Une mesure restrictive
Par ailleurs, le coordinateur national du Conseil des lycées d’Algérie (CLA), Achour Idir, a indiqué pour sa part qu’aucune notification dans ce sens n’est parvenue à son Organisation pour le renouvèlement de son dossier pour la justification du nombre d’adhérents.
Il a estimé que le ministère à travers cette réglementation veut imposer des restrictions à l’activité syndicale et éliminer les syndicats qui «dérangent!».
Affirmant que son syndicat procède périodiquement à l’envoi de la liste de ses adhérents au ministère du travail, Messaoud Boudiba, le porte-parole du Cnapeste, a indiqué que des «zones d’ombre» entourent la dernière sortie de Mourad Zemali et qui «nous amène à poser plusieurs questions».
« Notre syndicat le fait chaque année, mais pour cette fois, le délai est très court, c’est difficile de collecter tous ces détails dans les délais», a-t-il dit. Pour son syndicat, cette mesure est «restrictive».
Les juristes ont affirmé que la condition de 20% de représentativité exigée par le ministère du Travail est légale et conforme à la législation du travail.
L’ancien président de la Ligue de défense des droits de l’Homme, Boudjemaâ Ghachir, a affirmé que ce seuil est exigé par la loi pour agréer une organisation syndicale. Il a, en effet, précisé que les syndicats contestataires de cette loi sont devant l’incapacité de satisfaire cette condition.
Il est à rappeler que Zemali a indiqué, samedi dernier à Alger, que «tout syndicat, qui n’est pas représenté dans 20 wilayas au minimum, ne sera pas reconnu, à partir du 31 mars 2018». «Les grèves des syndicats qui ne revendiquent pas une représentativité dans 20 wilayas seront déclarées illégales», avait-il prévenu, en faisant allusion au mot d’ordre de grève lancé par une intersyndicale de plusieurs secteurs pour le 4 avril.
66 syndicats appelés à prouver leur représentativité
Une liste exhaustive des 66 organisations syndicales de travailleurs enregistrées à fin février 2018 par le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, conformément à la loi n°90-14, est jointe en annexe du communiqué.
Le ministère rappelle que la loi n°90-14 du 2 juin 1990, modifiée et complétée, relative aux modalités d’exercice du droit syndical, a déterminé les conditions et la procédure de constitution des organisations syndicales ainsi que les critères de leur représentativité au sein des organismes employeurs et au niveau national.
En effet, «la création d’un syndicat obéit au respect des dispositions de la loi n° 90-14 visée ci-dessus, qui précisent que l’organisation syndicale se constitue en assemblée générale constitutive regroupant ses membres fondateurs de travailleurs ou d’employeurs de mêmes professions, branches ou secteurs d’activité».
Il importe de mentionner que «l’organisation syndicale de travailleurs ou d’employeurs est déclarée constituée après dépôt de la déclaration de constitution auprès des autorités compétentes, selon le champ territorial retenu par ses membres fondateurs».
La loi a énoncé les dispositions que doivent inclure les membres fondateurs dans le statut de leur organisation syndicale, notamment «les objectifs que vise l’organisation syndicale dans ses missions de défense des intérêts matériels et moraux de ses membres, sa dénomination,
son mode d’organisation, la compétence territoriale et la catégorie professionnelle, branche ou secteur d’activité couverte».
Dès la mise en conformité du dossier par rapport à la loi, «la formalité d’enregistrement est engagée à travers la délivrance d’un récépissé d’enregistrement de la déclaration de constitution». Un descriptif procédurier qui sonne comme un rappel à l’ordre des syndicats et trace du coup une ligne rouge qui sépare l’activité syndicale légale de celle clandestine.